jeudi 30 septembre 2010

Une étonnante description de la Grande Pyramide, par l’abbé P. Gottis (XIXe s.)


Il fut une époque où les pèlerinages en Terre Sainte incluaient tout logiquement, dans leur programme, un détour par l’Égypte et le site de Guizeh. Ce fut notamment le cas de celui accompli par l’abbé P. Gottis (dont je n’ai trouvé aucune information complémentaire me permettant de mieux l’identifier) et qui fut relaté dans Récits d'un pèlerin, après son retour de la Terre-Sainte en l'année 1868.
On ne saurait mettre en doute, pour ce qui concerne la description de la Grande Pyramide, que l’auteur raconte ce qu’il a vu (ou croit avoir vu ?) de ses yeux. On remarquera néanmoins que certains détails de ce récit ne correspondent pas exactement à la configuration du monument tel que nous pouvons aujourd’hui le visiter :
- non pas une “encoche” sur l’arête (nord-est) de la pyramide, mais “deux ou trois chambrettes” ;
- la Chambre du Roi située “aux trois quarts de la pyramide” ;
- le couvercle du sarcophage toujours présent ;
- la voûte de la Chambre du Roi “légèrement cintrée” ;
- des hiéroglyphes visibles sur les parois de la chambre ;
- une “petite chambre carrée” et un “caveau souterrain” attenants à cette chambre.
Très étonnant enfin ce “grand vide en carré perpendiculaire” remontant vers le sommet de la pyramide par lequel, à l’aide de machines, on montait “peut-être” les blocs servant à édifier les degrés.
Une construction de l’intérieur vers l’extérieur : tiens, tiens ! Comme c’est étrange !


Cavité d’al-Ma’moun, cliché des frères Edgar (http://www.egyptarchive.co.uk/) 
“Ces pyramides construites en pierre de taille calcaire et à gros blocs, ne sont pas, comme le croient la plupart, un plan uni, incliné jusqu'au sommet. C'est une suite non interrompue d'énormes degrés, ayant pour base un carré immense. Ce carré à mesure que la pyramide s'élève, se rétrécit sur ses quatre faces de toute la largeur du degré superposé, jusqu'à ce qu'enfin il n'y ait plus de place que pour une dernière pierre. Tous ces degrés successifs qui forment la pyramide de Chéops, peuvent avoir en moyenne un mètre de hauteur sur 50 ou 60 centimètres de large. Mais que de degrés à monter !... et par suite quels grands coups de compas à donner pour les gravir ! Quelle fatigue!
Voici comment s'opère cette longue et périlleuse ascension. (...) C'est par le milieu à peu près de la pyramide que commence cette si rude ascension. Après avoir monté quelques degrés, on se dirige vers l'angle de gauche. L'arête en étant toute dégradée par les frimas, les vents, les pluies, les ouragans, les tempêtes ; par cet angle l'ascension est moins difficile. Tout en l'escaladant, je remarque deux ou trois chambrettes très régulières, en pierre de taille, dont l'entrée correspond à cet angle. Arrivés à peu près à moitié hauteur, on revient encore au milieu pour y continuer le reste de l'ascension. (...)
[Après la descente de la pyramide, commence la visite de l’intérieur] Arrivés à une certaine profondeur, nous cessons de descendre. Alors s'ouvre et s'élève au-dessus de soi, un grand vide également en carré perpendiculaire et remontant vers le sommet de la pyramide ; on dirait tout d'abord un ciel ouvert, si dans le haut celui-ci n'était tout à fait fermé. Peut-être est-ce par ce vide qu'au moyen de machines puissantes, on montait à mesure et sans les endommager, ces énormes blocs qui maintenant forment des degrés à l'extérieur. Là, le couloir commence à monter assez verticalement. Nulle part il n'a de degrés ; c'est toujours un plan incliné sur lequel par intervalles après coup, on a pratiqué de grossières entailles qui évitent beaucoup de chutes.
(...) Après quelque temps, le couloir reprend presque la direction horizontale ; toutefois son plan est encore incliné vers le bas. On doit être alors à peu près au milieu de la hauteur de la pyramide. Tout à coup, nous nous trouvons dans une salle carrée, assez vaste , en granit bien poli, voûtée, mais sans ornements aucuns.
- Voilà, me dit alors mon guide, voilà la chambre de la reine !
(...) Cette chambre n'ayant absolument que les quatre murs, fut bientôt visitée. À sa suite il n'y pas d'autre couloir, et il faut revenir quelque temps sur ses pas. Parvenus à la partie qui remonte un peu en spirale, l'ascension devient tout à coup très difficile et même très dangereuse, le couloir étant brusquement tronqué. Pour aller le rejoindre, il faut se hasarder sur une plaque en marbre, très étroite, très glissante, sans entailles et engagée seulement par un côté dans le mur. Elle est là sur le gouffre qu'on a à ses pieds, à peu près comme une petite passerelle sur un profond abîme. (...) Ce si effrayant passage heureusement franchi, nous montons encore. Parvenus aux trois quarts de la pyramide, l'ascension verticale cesse. Alors un nouveau couloir presque horizontal, toujours à plan un peu incliné, succède à celui que nous venons de suivre. Nous nous y. engageons et, après un certain temps, par une pente assez douce, nous arrivons à une seconde salle carrée, beaucoup plus grande que la première et qui doit occuper, comme celle de dessous, à peu près la partie centrale de la pyramide. Quelle immense profondeur cependant pour arriver jusqu'à ces salles qui ne seraient ainsi qu'à moitié largeur !
- C'est la chambre du grand roi Pharaon, me dit aussitôt mon guide.
Celle-ci est bien plus remarquable. Ses parois en granit vert, tacheté de blanc, sont très polies. Des inscriptions égyptiennes, des figures hiéroglyphiques y sont dessinées à grands traits. La voûte en est légèrement cintrée, à peu près comme le couvercle d'un coffre un peu bombé. En entrant, à droite, on voit un immense sarcophage : il est en marbre grisâtre d'un seul bloc, un peu détaché du mur et tout ouvert. Son couvercle également en beau marbre, est à côté et dressé entre le sarcophage et le mur. Vraiment ce pharaon auquel il fut destiné, devait être un géant.
Apercevant une petite porte carrée à la suite du sarcophage, à gauche, j'entre et ne trouve qu'une petite chambre carrée aussi et complètement à vide. Allant alors vers le coin de droite, j'y vois une ouverture sur le sol dans l'angle. Un petit escalier y conduit à un caveau souterrain. Mon Arabe seul y descend et m'en rapporte des débris de ce même granit vert mêlé de blanc, qui décore les parois de la grande chambre. N'ayant absolument plus rien à y remarquer et les couloirs finissant là, nous revenons encore sur nos pas et commençons à effectuer notre descente.”
Source : Gallica

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