lundi 27 septembre 2010

Les pyramides de Guizeh et le Sphinx, selon l’interprétation ésotérique d’Ernest Bosc (XIXe s.)

Connu sous son pseudonyme J.Marcus de Vèze, l’architecte Ernest Bosc (1837-1913) fut un écrivain prolixe, à qui l’on doit un Dictionnaire raisonné d'architecture et des sciences et arts qui s'y rattachent, un Dictionnaire de la curiosité et du bibelot, un Dictionnaire général de l'Archéologie et des Antiquités chez les divers peuples, un Traité complet théorique et pratique du chauffage et de la ventilation des habitations privées, et des édifices publics, des Études sur les hôpitaux et les ambulances, un Dictionnaire d'orientalisme, d'occultisme et de psychologie...
Il était tout particulièrement intéressé par l’alchimie, l’ésotérisme, les sciences occultes, sans oublier les drogues dont les facultés hallucinogènes créent des liens entre les mortels et les puissances occultes.
Le texte qui suit est extrait de Isis dévoilée ou l'égyptologie sacrée (1891).
L’auteur s’y démarque tout d’abord de la relation d’Hérodote relative aux humiliations que Khéops est censé avoir fait subir à son peuple pour l’asservir à ses volontés hégémoniques. Puis, par simples touches, il consacre quelques courts paragraphes à la description des pyramides et un développement un peu plus long au Sphinx.
On ne manquera pas de remarquer les imprécisions du récit, surprenantes sous la plume d’un architecte. Il a beau écrire, à propos du Sphinx, “On ne saurait se faire une idée du colosse sans l'avoir vu”, on peut douter qu’il soit jamais allé lui-même visiter le site de Guizeh. Sa préoccupation, à l’évidence, est plus de l’ordre de la symbolique que de la description. “La pyramide, note-t-il, renfermait plusieurs chambres sépulcrales et un ou plusieurs couloirs qui avaient des directions diverses.” Difficile d’imaginer plus plate banalité ! Étonnant, une fois encore, de la part d’un architecte...





“Parmi les monuments de l'Ėgypte, ceux qui frappent le plus d'étonnement le voyageur par leur masse imposante, ce sont les pyramides. Leur destination a fourni matière à de nombreuses dissertations, mais aujourd'hui, on sait fort bien que ces constructions purement funéraires étaient destinées à des sépultures royales.
Hérodote, qui confirme cette destination, nous donne à l'égard de ces édifices des renseignements que nous allons reproduire ici en partie, pour permettre au lecteur de se faire une idée de l'immense travail qu'il a fallu accomplir pour ériger ces constructions gigantesques.
Voici ce qu'Hérodote nous apprend relativement à la pyramide de Chéops : « Il (Chéops) condamna indistinctement les Égyptiens aux travaux publics. Les uns furent contraints à tailler les pierres, dans les carrières de la chaîne Arabique, et de les traîner jusqu'au Nil ; d'autres à recevoir ces pierres qui traversaient le fleuve sur des barques et à les conduire dans la montagne du côté de la Lybie. Cent mille hommes, relevés tous les trois mois, étaient continuellement occupés à ces travaux; et dix années, pendant lesquelles le peuple ne cessa d'être accablé de fatigues de tout genre, furent employées à faire seulement un chemin pour voiturer les pierres, ouvrage qui ne paraît pas inférieur à l'élévation même de la pyramide qui coûta vingt années de travaux... Sur une des faces de la pyramide, on a marqué en caractères égyptiens, la quantité de raves, d'oignons et d'aulx qui ont été consommés par les ouvriers ; et si je me rappelle bien ce que mon interprète m'a dit en me traduisant l'inscription, la dépense pour ces seuls aliments a été de mille six cents talents d'argent. Chéops, pour subvenir à ces dépenses en vint à de tels excès, que, manquant de ressources, il exigea de sa fille qu'elle se prostituât, et qu'elle lui procurât de cette manière autant d'argent qu'elle le pourrait. On ne m'a pas dit quelle somme elle amassa par ce moyen d'après les ordres de son père, mais on m'a assuré qu'ayant formé le projet délaisser après elle un monument sous son propre nom, elle avait exigé que chacun de ceux avec qui elle avait eu commerce lui fît don d'une pierre, propre à être employée dans les ouvrages qui s'exécutaient alors, et qu'elle avait fait élever avec ces pierres la pyramide qui se trouve au milieu des trois, en face de. la grande. »
Nous ne poursuivrons pas ce récit d'Hérodote, qui nous paraît un peu bien fantaisiste. Il nous paraît difficile d'admettre qu'un Pharaon ait pu exiger la prostitution de sa fille pour se procurer des ressources, surtout quand il s'agit de trouver des vingtaines de millions, car si les radis, les oignons et les aulx consommés par les ouvriers s'élevaient à près de neuf millions de francs, combien faut-il compter de millions pour payer l'outillage, la machinerie, les vêtements et autres dépenses nécessitées par ces travaux ?
Et quel contingent aurait pu fournir la pauvre fille du Pharaon dans tout cela ?
On doit donc ranger parmi les fables ce petit conte d'Hérodote, de même que la haine que s'étaient attirée, d'après cet auteur, Chéops, Chephrem et Mycérinus, en imposant aux Égyptiens de ces corvées considérables pour la construction de leur pyramide; nous savons, au contraire, que ces trois pharaons furent honorés après leur mort d'un culte tout spécial, probablement à cause des travaux qu'ils avaient exécutés.
Mais n'insistons pas plus longtemps sur ce récit et parlons des pyramides, qui font partie de la vaste Nécropole de Memphis qui s'étend des pyramides de Gizeh aux tombeaux de Saqqarah, village arabe, dont les principaux monuments sont la pyramide à degrés, les tombeaux de Ti, de Ptah-Hotep, enfin le Sérapéum, c'est-à-dire le lieu de sépulture des Apis morts pendant une longue suite de siècles.
La Pyramide de Saqqarah daterait de la seconde dynastie, de la première même, suivant Mariette ; sa construction, bien que remontant à plus de 6.000 ans, témoigne, cependant, d'un art très avancé, soit par sa superbe taille, soit par l'appareillage exact de ses énormes blocs.
La plus grande pyramide de Gizeh, dont la base est un carré de 227 mètres de côté, devait mesurer primitivement 146 mètres de hauteur ; cet ensemble donne en chiffres ronds un cube de 2.577.000 mètres qui aurait pu fournir des pierres pour construire un mur de deux mètres de hauteur, un mètre d'épaisseur et 1.288 kilomètres ou 122 lieues de longueur et cette énorme masse ne servait qu'à abriter une momie !
La pyramide renfermait plusieurs chambres sépulcrales et un ou plusieurs couloirs qui avaient des directions diverses, afin de déjouer les calculs coupables de ceux qui auraient été tentés de violer les sépultures.
Les matériaux employés pour la construction sont des calcaires, mais parfois l'intérieur de la chambre principale a les revêtements de ses parois en granit ; c'est dans cette chambre que se trouve la momie pour laquelle le monument a été érigé.
L'entrée de la pyramide est toujours cachée avec le plus grand soin sur le parement extérieur qui était une pierre polie.
Parfois, les couloirs qui vont d'une chambre à l'autre communiquent entre eux, mais, ils sont toujours coupés dans leur parcours par des puits très profonds, creusés dans le roc même qui sert d'assise à la pyramide.
D'après Manéthon, certaines pyramides de Memphis seraient les plus anciens monuments de l'Ėgypte, ce qui confirmerait l'opinion de Mariette.
Nous venons de voir que dans la Basse Ėgypte, les pyramides étaient la dernière demeure des rois et des grands fonctionnaires de l'État.
Dans la Haute Ėgypte, les mêmes personnages ainsi que les divers membres de leur famille étaient enterrés dans des hypogées ou immenses excavations creusées dans les flancs des montagnes. L'entrée de ces hypogées était parfois visible, mais plus souvent cachée ; un simple simulacre de porte était taillé sur le flanc même du rocher. Un grand nombre de couloirs conduisaient, par des issues dissimulées, dans la grande chambre sépulcrale, dans laquelle se trouvait ordinairement un sarcophage en granit ou en basalte. Bien des hypogées ont leurs parois latérales et même leurs plafonds couverts de sculptures entaillées et coloriées ; ces mêmes parois sont souvent décorées d'inscriptions hiéroglyphiques.
(...)
Nous ne saurions terminer ce chapitre sans parler du Sphinx, non seulement parce que les avenues conduisant aux temples étaient décorées parfois de ces animaux symboliques, mais surtout à cause de celui situé au Sud-Est de la grande pyramide de Gizeh, dénommé le Grand Sphinx et qui a fourni matière à de nombreuses fables, qu'il est indispensable de réfuter.
Ainsi le petit conte d'Oedipe et du Sphinx est une puérilité sans nom, qui n'a servi qu'à dénaturer le magnifique symbole que la philosophie grecque ne connut que du temps de Platon.
Le Sphinx, nous ne l'ignorons plus aujourd'hui, est une clef de la science occulte, dont voici l'explication : c'est un composé qui, dans son unité, renferme quatre symboles : savoir, vouloir, oser, se taire, qui forme un quaternaire occulte. C'est pourquoi le Sphinx est représenté avec une tete et une poitrine de femme : savoir (intelligence) ; un corps de taureau : vouloir (avoir la force) ; les pattes et les griffes du lion : oser (audace) ; enfin, des ailes recouvrant les flancs de l'animal : se taire (voiler ses desseins jusqu'au moment propice).
Le Grand Sphinx est un rocher naturel auquel on a donné grossièrement la forme de l'animal ; seule la tête a été sculptée. La hauteur du colosse mesure près de 20 mètres (exactement 19 m. 97) ; sa longueur est de 39 mètres environ ; la tête a 8 m. 50 de hauteur et la figure, dans sa plus grande largeur, 4 m. 20 ; l'oreille a 1 m. 80 de hauteur, le nez 1 m. 85 et la bouche 2 m. 32 de largeur. Le contour de la tête mesure au niveau du front 26 m. 40 de circonférence.
On ne saurait se faire une idée du colosse sans l'avoir vu ; l'effet est fantastique, même aujourd'hui, où il est si fortement ruiné. Quand le colosse devait être neuf, qu'un revêtement de granit modelait son corps, il devait briller au soleil d'un vif éclat, de même que les ornements symboliques qui ornaient sa tête. C'était sans doute une merveille laissant bien loin, derrière elle, tous les grands monuments de notre ferronnerie créés, pourtant si remarquables, par le puissant outillage de notre chaudronnerie moderne.
Ce colosse avait un emploi, Jamblique nous l'apprend, et voici ce qu'en dit Champollion-Figeac : « Le sphinx des pyramides a été étudié, le sable qui l'encombrait momentanément détourné, et il a été reconnu que ses colossales dimensions avaient permis de pratiquer entre le haut de ses jambes antérieures et son cou, une entrée qu'indiquent d'abord les montants d'une porte ; celle-ci conduisait à des galeries souterraines creusées dans le rocher sur une très grande distance, et enfin, on se trouvait en communication avec la grande pyramide.
Ce qui expliquerait :
1° Ce que disent les écrivains arabes, savoir : qu'il y avait plusieurs puits et galeries souterraines dépendant de la grande pyramide ;
2° Qu'il y avait dans la tête du sphinx, une ouverture qui menait à ces galeries et à la pyramide ; enfin, on comprend pourquoi on ne pouvait entrer dans la pyramide par une porte extérieure, et comment les galeries qui y étaient pratiquées étaient extérieurement fermées par une porte et par des blocs de granit. »

Source : Gallica


Un autre morceau choisi de cet auteur proposé par L'Égypte entre guillemets :

"L'Art sacré égyptien est devenu, au Moyen Âge, l'alchimie et, de nos jours, la chimie" (Ernets Bosc)

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