Jacques Delille (Wikimedia commons)
"Leur masse indestructible a fatigué le temps" : ce vers du poète Jacques Delille (1738-1813) est célèbre. S'il est applicable par excellence aux monuments égyptiens, il est en fait extrait du poème Jardins relatif aux monuments de l'ancienne Rome.
Delille a toutefois écrit ce poème spécifiquement dédié aux pyramides d'Égypte :
"Ô colosses du Nil, séjour pompeux du deuil,
Oh ! que l'œil des humains vous voit avec orgueil !
Devant vos fronts altiers s'abaissent les montagnes,
Votre ombre immense au loin descend dans les campagnes ;
Mais l'homme vous fit naître, et sa fragilité
Vous a donné la vie et l'immortalité.
Que de fois, à vos pieds m'asseyant en silence,
J'évoque autour de vous tout cet amas immense
De générations, de peuples, de héros,
Que le torrent de l'âge emporta dans ses flots ;
Rois, califes, sultans, villes, tribus, royaumes,
Noms autrefois fameux, aujourd'hui vains fantômes !
Seuls vous leur survivez : vous êtes à la fois
Les archives du temps et les tombeaux des rois,
Le dépôt du savoir, du culte, du langage,
La merveille, l'énigme et la leçon du sage.
Reçois donc mon tribut, ô toi de qui la main,
Sur leur roc, plus solide et plus dur que l'airain,
Gravas mes faibles vers! Coulez, siècles sans nombre,
Nations, potentats, passez tous comme une ombre,
Ces murs sont mon trophée ; et, vainqueur du trépas,
Je puis dire à mon tour: "Mes vers ne mourront pas."
L'Imagination, ch. III
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