Photo Marc Chartier
Cette montagne de pierres est formée d'assises régulières, en retraite les unes au-dessus des autres, et formant tout autour de véritables marches, dont quelques-unes ont jusqu'à 3 pieds de hauteur. Il y a 202 de ces gradins, formant une hauteur verticale de 140 mètres, pour la pyramide, dans son état actuel. La base a une longueur de 233 mètres ; l'arête se trouve alors avoir 216 mètres de longueur ; il en résulte un volume de 7.536.130 mètres cubes. La pyramide repose sur un banc de roches élevé de 100 pieds environ au-dessus du Nil. Les matériaux proviennent des montagnes de calcaire blanc des environs. Les pierres qui forment les assises sont de gros blocs parfaitement joints et incrustés l'un dans l'autre, la pierre inférieure creusée de deux pouces, recevant une saillie égale de la pierre supérieure. Anciennement, cette pyramide était revêtue extérieurement au moyen de prismes triangulaires de granit qui remplissaient les vides et formaient un plan incliné d'un accès très difficile (2).
C'est par l'arête du côté de l'est que se fait l'ascension. Les deux Arabes ayant retroussé leur chemise jusqu'à la ceinture, pour être plus lestes, me tendirent chacun une main à laquelle je m'accrochai ; et les voilà, sautant comme des chacals, de marche en marche, et me traînant à la remorque. Il m'était difficile de modérer leur ardeur ; ils me montraient mon compagnon qui était en avant, et me faisaient signe qu'il allait arriver plus tôt que nous ; mais cela m'importait peu, et je cherchais à ralentir la rapidité de leur course. Vers le milieu de l'arête, je m'arrêtai un instant à une espèce de niche formée par la chute de plusieurs pierres. À peine avais-je un peu soufflé que nous reprîmes notre ascension, mes bédouins escaladant toujours, en courant, et me tirant après eux, au risque de n'arriver au sommet qu'avec mes bras désarticulés, et de laisser le corps en arrière. Il me fallait lever la jambe pour poser le pied à une hauteur de deux à trois pieds ; ils m'enlevaient alors vigoureusement sur le gradin, tandis qu'un troisième, qui était là par contrebande, poussait quelquefois par derrière. Il fallut répéter cet exercice, sans relâche, deux cent deux fois de suite, en vingt minutes à peu près. Ils me déposèrent donc, haletant et en nage, sur une plate-forme, formée par l'enlèvement des deux ou trois assises du sommet, et assez large pour tenir plusieurs personnes.
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Les pyramides sont orientées avec une précision qui dénote les connaissances astronomiques du peuple qui les a construites. Les quatre arêtes sont tournées bien exactement vers les quatre points cardinaux.
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Suit la relation de la visite de l'intérieur de la pyramide :
On descend d'abord un couloir incliné, de 75 pieds de long et de 3 pieds 5 pouces en hauteur et en largeur. On en remonte un autre de mêmes dimensions, mais long de 202 pieds. Les deux galeries sont raides et glissantes, malgré des trous qu'on y a faits. Il faut se plier en quatre, ce qui est très fatigant, pour monter ou descendre. Dans le passage d'un canal à l'autre, on est même obligé de marcher en rampant. On arrive ensuite à un palier près duquel est un puits étroit, dont on n'a pas pu trouver le fond. Sur ce palier, on découvre une nouvelle galerie ascendante, longue de 125 pieds, haute de 25, et large de 6 et 1/2, dans laquelle on peut se tenir debout. De chaque côté sont des banquettes de 21 pouces, à chacune desquelles on remarque des trous de 6 pouces de profondeur, de distance en distance. C'est sur ces banquettes très glissantes que l'on marche. On arrive ensuite dans un vestibule ; puis on passe, en rampant, par une ouverture étroite, longue de 8 pieds, qui sert d'entrée à une chambre, nommée chambre du roi, placée au centre géométrique de la pyramide. Cette chambre a 18 pieds de hauteur, et 32 sur 16 en carré. Elle est revêtue de blocs de granit poli. On y trouve un sarcophage en granit, sans couvercle.
Que de milliers de bras ont été employés pour élever ces gigantesques monceaux de pierres ! Il a fallu sacrifier plus de matériaux, plus d'argent, plus d'hommes que n'en emploierait la construction d'une ville. Eh bien ! Tout ce travail, toutes ces sueurs dépensées n'avaient d'autre objet que de conserver dans un cercueil un cadavre royal. Précautions inutiles ! Le cercueil est vide ; et l'on n'a jamais su ce qu'était devenue la momie.
(1) Quelques personnes ont voulu contester le chiffre élevé de l'âge de ces monuments, et ne les font pas remonter au delà du XIIe siècle avant J.-C., postérieurement à Sésostris. Cette opinion n'est guère admissible, si l'on compare les pyramides aux édifices construits depuis les dynasties thébaines. Il en est aussi qui veulent qu'elles aient été élevées par les Hébreux, pendant leur captivité. Ceux-là n'ont probablement pas lu l'Exode. Au chap. 1, v. 2, il est dit positivement que les Israélites bâtirent à Pharaon deux villes, Phitom et Ramesès; et au v. l4, qu'on les employa à faire du mortier et de la brique. Dans d'autres passages, il est encore question de cette brique ; mais on ne trouve rien qui ait rapport aux pyramides, lesquelles étaient bâties en pierres et sans mortier. Les Israélites occupèrent d'ailleurs la terre de Gessen, qui était dans le Delta, plus bas qu'Héliopolis, et les pyramides sont bien au-dessus, près de Memphis. Les pyramides doivent être d'une époque bien antérieure à celle de l'arrivée des Hébreux en Égypte.
(2) Les mesures de la pyramide sont extraites d'un ouvrage de Champollion-Figeac.
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