vendredi 2 septembre 2011

D’après Gabriel Dallet (XIXe s.), la “disposition particulière” des faces des pyramides de Guizeh est due à une “coïncidence bizarre”

“L'astronomie n'est pas, comme on est fort tenté de le croire, une science aride et ingrate, dont les spéculations dépassent la portée de l'intelligence ; loin de là, son étude recèle un charme profond qui est, pour ses adeptes, une source de plaisirs calmes et tranquilles.
L'ouvrage que nous présentons au public n'est pas écrit pour les savants ; il a été fait spécialement pour les amateurs de science, c'est-à-dire pour tous ceux qui, n'ayant pas une connaissance approfondie des lois mathématiques, n'en ont pas moins un grand désir de s'initier à l'étude des étoiles, aux curiosités du ciel, aux merveilles de l'infini.”
C’est en ces termes que Gabriel Dallet (*) introduit son ouvrage Astronomie pratique : le soleil, les étoiles, édité en 1890, dont le texte ci-dessous est extrait.
Le choix, par les architectes égyptiens, de l’orientation des pyramides en fonction d’indications fournies par une observation scientifique des corps célestes a fait l’objet de maintes publications. Gabriel Dallet ajoute ici sa pierre à l’édifice des constatations et hypothèses allant dans le sens d’une réelle logique constructive, ignorant toute “circonstance fortuite”. Une certaine “coïncidence bizarre” lui permet même d’induire des considérations, selon lui plausibles, sur l’âge des pyramides.
(*) Internet, même trituré et scruté dans ses derniers recoins, ne m’a livré aucune information sur cet auteur.


“À trois lieues environ du Caire, qui s'élève sur l'emplacement de l'antique Memphis, vers l'est, on aperçoit de nombreux monuments qui affectent la forme de pyramides à base carrée. Ce sont les pyramides de Giseh (qui s'écrit aussi Jeseh, Ghiseh, Dscheezeh).
Parmi ces colosses de pierre, trois se distinguent par leurs proportions gigantesques : ce sont les pyramides de Chéops, de Chéphren, son frère, et de Mycérinus, fils de Chéops.
La pyramide de Chéops, qu'on connaît généralement sous le nom de Grande Pyramide, a une hauteur évaluée à 149 mètres au-dessus du sol, c'est-à-dire qu'elle est aussi élevée que la flèche de la cathédrale de Rouen, ou deux fois plus haute que le Panthéon de Paris, ou bien encore environ cinq fois et demi plus élevée que l'Observatoire de Paris.


Ce qui frappe tout d'abord, c'est l'orientation des pyramides : leurs quatre faces regardent les points cardinaux, et ce n'a pas été une circonstance fortuite qui les a disposées ainsi, car tous les monuments de cette sorte qui se rencontrent dans la plaine de Giseh se trouvent placés comme celui dont nous parlons, et la constance de cette orientation est une preuve de la volonté bien arrêtée de ceux qui les ont fait édifier.
La disposition particulière des faces de ces pyramides a fait croire que ces monuments pourraient donner des indications précieuses sur l'astronomie des Égyptiens. À la suite de l'astronome Piazzi Smyth, on a mesuré les pyramides dans tous les sens, et des rapports trouvés entre ces diverses valeurs on a conclu que les Égyptiens connaissaient le rapport du cercle à la circonférence, l'obliquité de l'écliptique, la distance du Soleil à la Terre, etc.
Il semble raisonnable de penser que ces résultats sont dus à une coïncidence bizarre, qui ne doit pas manquer de se produire lorsqu'on torture, d'un esprit prévenu, une quantité considérable de chiffres. Il y a cependant certaines constatations fort heureuses qui paraissent rationnelles et
qui présentent un réel intérêt.
On a tenté de déterminer l'âge de la Grande Pyramide à l'aide des travaux des archéologues, en se basant sur certains fragments de Manéthon, sur les papyrus de Turin, etc. On est arrivé à fixer la dynastie de Chéops trente-quatre ou trente-cinq siècles avant l'ère chrétienne.
Au point de vue astronomique, les constatations suivantes ont pu être faites. Si l'on considère l'inclinaison moyenne des faces des pyramides, on trouve une valeur moyenne de 52°. De plus, quand la plus brillante étoile, Sirius, passe au méridien du lieu, le rayon qu'elle envoie tombe sur la face méridionale de la Grande Pyramide sous une inclinaison de 5° et demi environ.
Il n'en a pas toujours été ainsi, la précession des équinoxes faisant varier la situation apparente des étoiles si l'on tient compte de ce mouvement pour Sirius, on trouve que, 3.003 ans avant Jésus-Christ, sa hauteur était telle que, lorsqu'elle passait au méridien, ses rayons venaient frapper perpendiculairement les faces de la Grande Pyramide.
Continuons nos recherches. On pensait bien que ce n'était pas sans raison que les Égyptiens avaient bâti ces énormes édifices et qu'ils devaient avoir une destination particulière.
Sur les neuf pyramides que l'on voit à Giseh, six ont leur entrée tournée vers le nord. Ce point élucidé, on découvrit heureusement que la Grande Pyramide avait été un tombeau. L'entrée était restée introuvable, et ce n'est que dans le siècle dernier que l'on découvrit la fameuse galerie inclinée qui débouche au milieu de la face nord. Cette inclinaison de 26° 27' avec l'horizontale attira l'attention, parce qu'il n'y avait aucune raison de ne pas faire horizontal un couloir qui conduisait simplement au centre de la Pyramide, à la Chambre du roi (1).
Lorsqu'on se trouve au fond du couloir et qu'on regarde l'entrée du tunnel, on découvre une partie du ciel ; or la partie de ciel que l'on aperçoit correspond à la position qu'occupait, il y a 3.910 ans, l'étoile du Dragon, qui était polaire à cette époque.”

(1) On l'a ainsi nommée, parce que c'est là que l'on a découvert un sarcophage qui contenait probablement la dépouille du souverain.

Source : Gallica