Sa grille de lecture comporte les éléments constitutifs des monuments ainsi que de leurs annexes cultuelles et funéraires, quelques rappels historiques de leur découverte, les caractéristiques de leur structure, les matériaux utilisés, le tout à grand renfort d’une somptueuse et abondante iconographie (photos et dessins). Franck Monnier garde en ligne de mire la constante évolution de l’architecture égyptienne, marquée par le constat que "les architectes cherchaient à concilier au mieux les préceptes religieux et le langage de la pierre", compte tenu des inconnues et incertitudes qui s’obstinent encore à ponctuer toute démarche aussi objective et scientifique que possible.
pyramide de la Reine - complexe d'Ouserkaf, Saqqara collection Franck Monnier |
D’emblée, l’auteur fait état de la profusion des théories visant à expliquer l’édification des pyramides et de "notre incapacité actuelle" à résoudre ce problème, même si notre ignorance n’est que partielle, dans la mesure où l’archéologie nous fournit des indices qui permettent de "lever partiellement le voile sur cette énigme".
Seules retiennent son attention les théories qui jouissent d’une réelle notoriété : celles ayant recours à des machines élévatrices (inspirées plus ou moins directement des “morceaux de bois courts” d’Hérodote) ; celles prônant l’utilisation d’une rampe (frontale, enveloppante…) dans la lignée des “terrasses” de Diodore de Sicile ; celles enfin utilisant des "voies de traction aménagées au sein de la pyramide". Pour cette dernière catégorie, il consacre quelques paragraphes à deux chercheurs actuels, Michel Michel et Jean-Pierre Houdin, mais les raccourcis du projet éditorial ne lui permettent pas de s’attarder sur les développements qui auraient été nécessaires pour appréhender, dans leur globalité et leur complexité, ces deux théories.
Franck Monnier, notions-nous précédemment, n’entend pas se hasarder dans une nouvelle théorie personnelle sur les techniques mises en oeuvre pour la construction des pyramides. L'important, dans sa démarche, est de garder en mémoire que la construction des pyramides ne peut être appréhendée sans une fine connaissance des monuments et de l'état de l'archéologie. Pour cette raison primordiale, en vertu de cette logique intellectuelle qu'il entend respecter, il s'interdit d'aller plus loin sans éléments complémentaires.
On notera toutefois cette "piste" qui pourrait alimenter des réflexions ultérieures : "Selon nous, une maçonnerie complémentaire en pierre locale enveloppant l'édifice et son revêtement sur une épaisseur de quelques mètres aurait pu permettre d'accéder en haut de l'ouvrage pour y commencer les finitions. Faisant corps avec le monument, elle aurait assuré la maîtrise des alignements et orientations au fil de la construction. Son démontage progressif aurait permis aux ouvriers de retailler et polir les assises de haut en bas. Ce surplus de maçonnerie aurait exigé une quantité de matériaux dérisoire au regard de l'ensemble du projet, et serait à même d'expliquer en quoi la périphérie de la base des plus grandes pyramides était dégagée. Selon nous, le temple haut, sous Khéops et Khéphren, aurait été dressé au-delà pour ne pas avoir à attendre le démontage intégral de cet échafaudage en pierre qui n'aurait eu lieu que vers la fin du règne. (...) L’échafaudage en pierre aurait donc été entièrement démonté une fois le parement en calcaire fin achevé."
pyramides de Giza - photo Marc Chartier |
L’histoire, la très longue histoire de ce que les pyramides ont pu inspirer à tous ceux qui cherchent à appréhender le savoir-faire des étonnants bâtisseurs égyptiens n’a donc pas révélé son dernier mot. “L’ère des géants” est toujours d’actualité...
MC
Franck Monnier, L'ère des géants - Une description détaillée des grandes pyramides d'Égypte, éditions de Boccard, 2017, 267 pages
Une interview de Franck Monnier dans "égyptophile" : ICI.