D'abord un constat : il n'est pas rare que les ouvrages et autres publications traitant de la construction des pyramides d'Égypte, pour y défendre telle ou telle thèse ou théorie, soient marqués par un certain ton polémique qui, à force d'être entretenu de façon quasi systématique, devient quelque peu lassant. Est-il indispensable, pour édifier une théorie, d'établir ses fondations sur les débris des propositions d'autres chercheurs, quand bien même ils ne seraient pas de la même école ?
Je reconnais qu'une telle atmosphère m'a rendu par moments difficile la lecture de l'ouvrage Le principe de la pyramide égyptienne, d'Eric Guerrier (Robert Laffont, 1981). Face aux "égyptologues" et "égyptomanes", l'auteur faut valoir sa qualité, donc ses connaissances et son expérience d'architecte-constructeur. Soit ! Mais, n'en déplaise à Claude Lévi-Strauss que l'auteur appelle à sa rescousse, pourquoi vouloir d'emblée mettre face à face les "bricoleurs" et les "ingénieurs" pour les opposer catégoriquement, déniant a priori toute éventuelle complémentarité ?
Autre détail de procédure dans lequel je me sens - modestement - concerné. "Une thèse universitaire, écrit Eric Guerrier, voudrait qu'on récensât toutes les théories émises et qu'on les confrontât ensuite en une analyse critique comparée. C'est un travail colossal qu'il serait harassant et inutile de reproduire ici. Il constitue, non seulement un type de savoir qui peut faire reculer indéfiniment le moment essentiel de la synthèse, mais encore lui être fatal par sa lourdeur." (op. cit. p. 186) Je n'ai évidemment aucune prétention à donner au contenu de ce blog une dimension "universitaire". Je reste néanmoins convaincu que la juxtaposition pacifique des différentes théories puisse avoir quelque utilité, ne serait-ce que pour témoigner de l'intérêt et des interrogations qu'a suscités et continue de provoquer la construction des "merveilleuses" pyramides de Guizeh.
Je reconnais qu'une telle atmosphère m'a rendu par moments difficile la lecture de l'ouvrage Le principe de la pyramide égyptienne, d'Eric Guerrier (Robert Laffont, 1981). Face aux "égyptologues" et "égyptomanes", l'auteur faut valoir sa qualité, donc ses connaissances et son expérience d'architecte-constructeur. Soit ! Mais, n'en déplaise à Claude Lévi-Strauss que l'auteur appelle à sa rescousse, pourquoi vouloir d'emblée mettre face à face les "bricoleurs" et les "ingénieurs" pour les opposer catégoriquement, déniant a priori toute éventuelle complémentarité ?
Autre détail de procédure dans lequel je me sens - modestement - concerné. "Une thèse universitaire, écrit Eric Guerrier, voudrait qu'on récensât toutes les théories émises et qu'on les confrontât ensuite en une analyse critique comparée. C'est un travail colossal qu'il serait harassant et inutile de reproduire ici. Il constitue, non seulement un type de savoir qui peut faire reculer indéfiniment le moment essentiel de la synthèse, mais encore lui être fatal par sa lourdeur." (op. cit. p. 186) Je n'ai évidemment aucune prétention à donner au contenu de ce blog une dimension "universitaire". Je reste néanmoins convaincu que la juxtaposition pacifique des différentes théories puisse avoir quelque utilité, ne serait-ce que pour témoigner de l'intérêt et des interrogations qu'a suscités et continue de provoquer la construction des "merveilleuses" pyramides de Guizeh.
Cette passe d'armes mise à part, l'ouvrage d'Eric Guerrier se distingue par quelques énoncés marquants. L'auteur met tout d'abord en exergue le fait que le chantier des pyramides fut mené à bien non seulement grâce à la maîtrise et à la mise en oeuvre de moyens humains et techniques qui ne laissent pas de surprendre "en une civilisation moins analytique et spécialisée que la nôtre", mais d'abord parce que "les Égyptiens d'alors maîtrisèrent assez bien tous les aspects de l'organisation et de la transmission des informations, puis de la planification". (p. 166) Puis d'ajouter :"... sans être négligeables, [les moyens humains et techniques] sont néanmoins dérisoires face aux monstres qu'ils ont produits. Mais au lieu de baisser les bras et de museler d'un même mouvement toute intelligence technique, puis de se jeter avec délectation dans les mirages de l'ésotérisme, il faut remarquer ce qui émerge de façon éclatante : l'ORGANISATION. Et sans doute est-elle difficile à mesurer et à appréhender archéologiquement... d'autant plus difficile à retracer qu'elle emprunte des chemins infiniment variés suivant tous les détours que la pensée et la main des hommes peuvent explorer et inventer. Mais le fait demeure : l'érection des pyramides n'est pas une victoire des biceps, mais de l'intelligence." (p. 167)
Autre postulat de l'auteur : les pyramides n'ont pas été commencées sur la totalité de leur surface de base pour être ensuite montées par assises horizontales successives. La logique constructive, le "principe" de ces pyramides veut qu'elles aient été construites par accrétion de strates verticales (et non horizontales !)
Sans se mêler au débat "rampistes-machinistes", Eric Guerrier opte pour la solution de la grue comme instrument de levage des blocs de pierre, cette grue à contrepoids fonctionnant avec des rappels sur le sol, des rondins (les "courtes pièces de bois") étant mis en place aux arêtes de l'édifice en construction pour faciliter le mouvement des cordages reliés d'un côté à la masse à élever, de l'autre, au contrepoids.
Puis il en vient à donner sa propre interprétation des krossai (habituellement traduits par "corbeaux") et bomides ("plates-formes") du texte d'Hérodote : "Voici comment en construisit cette pyramide [Khéops] : par le système des gradins successifs, que l'on appelle tantôt corbeaux, tantôt plates-formes (selon qu'on considère le méplat du gradin ou alors le saillant qu'il forme). On acheva d'abord le sommet de la pyramide (le noyau central), puis les étages en dessous, l'un après l'autre, et l'on finit par les gradins inférieurs et la base de l'édifice. On la construisit d'abord sous cette forme, puis on hissa les pierres de complément à l'aide de machines faites de courtes pièces de bois et on recouvrait ainsi les gradins les uns après les autres, déplaçant les machines au fur et à mesure à moins qu'il n'y en ait eu de mises en place sur tous les gradins à la fois." (pp. 244-245)
En conclusion de ses développements sur la pyramide de Khéops (ce pharaon se voit au passage qualifier d'"espèce de nabot au faciès légèrement mongolien" !), Eric Guerrier voit dans la succession des trois chambres de cette pyramide la preuve que celle-ci fut construite sans véritable planification d'ensemble. Résultat de "bricolages", géniaux certes, elle "est on ne peut plus médiocre... si on fait abstraction de ce qui nous épate : les millions de m³, les mégalithes, la finesse des tailles et finitions apparentes, la complexité apparemment mystérieuse des dispositions intérieures... Tout cela n'est qu'anecdotes au regard du véritable génie créateur d'Imhotep, par exemple. Car la virtuosité ne suffit pas au génie, même portée à un tel point de gigantisme qu'elle a fini par atteindre un sommet jamais égalé." (p. 315) Puis l'auteur, quelques lignes plus loin, modère quand même son propos :"Il n'en demeure pas moins que l'œuvre, ne serait-ce que par son gigantisme, témoigne d'un aboutissement extraordinaire sur le plan technique, sur le plan de l'organisation du chantier et sur celui de la qualification des mains-d'œuvre." (p. 316).
Il n'empêche que "en un sens moderne, la seule pyramide totalement parfaite est (...) celle de Khéphren."
Sur le même auteur, voir la note suivante : cliquer ICI
Consulter également cet article :"A quoi peut bien servir le dispositif coiffant la chambre de Kheops ?"
Puis il en vient à donner sa propre interprétation des krossai (habituellement traduits par "corbeaux") et bomides ("plates-formes") du texte d'Hérodote : "Voici comment en construisit cette pyramide [Khéops] : par le système des gradins successifs, que l'on appelle tantôt corbeaux, tantôt plates-formes (selon qu'on considère le méplat du gradin ou alors le saillant qu'il forme). On acheva d'abord le sommet de la pyramide (le noyau central), puis les étages en dessous, l'un après l'autre, et l'on finit par les gradins inférieurs et la base de l'édifice. On la construisit d'abord sous cette forme, puis on hissa les pierres de complément à l'aide de machines faites de courtes pièces de bois et on recouvrait ainsi les gradins les uns après les autres, déplaçant les machines au fur et à mesure à moins qu'il n'y en ait eu de mises en place sur tous les gradins à la fois." (pp. 244-245)
En conclusion de ses développements sur la pyramide de Khéops (ce pharaon se voit au passage qualifier d'"espèce de nabot au faciès légèrement mongolien" !), Eric Guerrier voit dans la succession des trois chambres de cette pyramide la preuve que celle-ci fut construite sans véritable planification d'ensemble. Résultat de "bricolages", géniaux certes, elle "est on ne peut plus médiocre... si on fait abstraction de ce qui nous épate : les millions de m³, les mégalithes, la finesse des tailles et finitions apparentes, la complexité apparemment mystérieuse des dispositions intérieures... Tout cela n'est qu'anecdotes au regard du véritable génie créateur d'Imhotep, par exemple. Car la virtuosité ne suffit pas au génie, même portée à un tel point de gigantisme qu'elle a fini par atteindre un sommet jamais égalé." (p. 315) Puis l'auteur, quelques lignes plus loin, modère quand même son propos :"Il n'en demeure pas moins que l'œuvre, ne serait-ce que par son gigantisme, témoigne d'un aboutissement extraordinaire sur le plan technique, sur le plan de l'organisation du chantier et sur celui de la qualification des mains-d'œuvre." (p. 316).
Il n'empêche que "en un sens moderne, la seule pyramide totalement parfaite est (...) celle de Khéphren."
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