Pas de renseignements disponibles sur son auteur, si ce n’est qu’il était secrétaire-adjoint de la Direction des Chemins de fer de ceinture de Paris
tableau de Pierre Henri Théodore Tetar van Elven, 1885 |
Sans doute, nous sommes loin d'être insensible aux travaux prodigieux de l'Inde et de l'Égypte, qui ont eu pour but de donner aux monuments démesurés de ces nations, une forme capable de frapper l'imagination des peuples.
Tous les ouvrages des Égyptiens, en particulier, leurs pyramides, leurs hypogées merveilleux avec leur système de substruction aux parois peintes et de voûtes formant d'interminables labyrinthes, leurs temples, leurs sphinx, affirment cette recherche de l'énorme et du gigantesque. En présence de leur œuvre colossale, de leur civilisation qui persiste tout entière, malgré ses secrets presque impénétrables, on reste confondu de la puissance et de la vitalité d'un tel peuple. On se demande alors quelle force a réuni tant de milliers de bras pour transporter des masses de pierres aussi considérables, si loin de toute carrière et de tout lieu habité.
On comprend que Khéops a dû faire preuve de qualités exceptionnelles pour dominer une telle nation, au point de la contraindre à travailler aux pyramides, cent mille hommes par cent mille hommes qu'on relevait chaque trimestre. Car ces armées de travailleurs ou d'esclaves, ou souvent de vaincus, ont dû extraire des blocs énormes des carrières de la chaîne arabique.
Ils ont dû les amener toutes taillées de la Haute-Égypte, les faire descendre sur le Nil, et de là sur l'autre rive, les traîner ensuite jusqu'à la chaîne libyque.
Pour assurer l'acheminement de ces matériaux, il a été nécessaire de solidifier les sables et de construire une chaussée, à la confection de laquelle il a fallu consacrer dix années de travail. Cette opération préliminaire seule est déjà digne de remarque.
Mais il faut non moins admirer le discernement qu'a montré ce peuple pour asseoir les fondations des pyramides de Khéops, des temples d'Edfou ou de Philœ et pour employer le ciment qui lie les assises de ces édifices.
L'usage de ce ciment, semblable à nos mortiers actuels, et qui a donné à l'analyse, après deux mille ans, les proportions ordinaires, est fort judicieusement restreint à garnir les joints très précis des blocs de pierre, sans lui faire jouer un rôle plus important et sans ajouter beaucoup à la cohésion de l'ensemble.
Les Égyptiens ont, avec raison, pressenti les effets funestes que le climat sec et brûlant de leur pays n'aurait pas manqué de produire sur le durcissement et la résistance des mortiers.
La patience, le soin, le savoir avec lesquels de tels travaux, d'aussi longs transports ont été effectués, le labeur persévérant avec lequel les hiéroglyphes ont été ciselés dans ces granits, tout montre bien le caractère fatal et grave de l'Égypte. Aussi, ces mœurs et ce caractère intime se reflètent-ils dans son architecture. La ligne droite, rigide, solennelle, sans autre ornementation que des signes sculptés, indique bien la gravité religieuse de cette race que les géants de pierre, assis majestueusement à la porte de ses temples, devaient impressionner d'une façon indéfinissable.
Cette gravité immuable est son signe propre. Elle s'est incrustée sur tous les vestiges laissés par ces populations silencieuses et recueillies. Elle s'est transmise jusqu'aux générations présentes, et le fellah moderne garde encore sur sa physionomie l'impassibilité de l'esclave des Pharaons.
Certes, les œuvres des Egyptiens nous frappent !”