lundi 2 mars 2009

"Les Pyramides d'Égypte - Le secret de leur construction", par Manuel Minguez

 
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J'ai déjà présenté dans le contenu de ce blog la théorie de Manuel Minguez : voir ICI. Pour ce faire, je n'étais pas en possession du livre (que l'on peut encore trouver sur ebay ou Price Minister) dans lequel cette théorie est longuement exposée (éditions Tallandier, 1985, 204 pages). Grâce à l'amicale obligeance de Manuel Minguez, j'ai pu combler cette lacune. D'où cette deuxième version de ma note, plus fournie et - je l'espère - reflétant de façon plus précise une technique de construction qui, tout en gardant la "modeste certitude des techniciens", n'en est pas moins étayée par une longue expérience des chantiers de génie civil (construction de ponts, de routes et de barrages).
Les pyramides du plateau de Guizeh sont perçues par Manuel Minguez au terme de ses patientes recherches et expérimentations, à l'image du pays qui les accueille, comme un "don du Nil". Autrement dit, selon lui, le transport des matériaux qui ont servi à leur édification et leur construction même n'auraient pas été possibles sans la mise en œuvre de tout un réseau hydraulique alimenté par les eaux du Nil et répondant aux contraintes spécifiques d'un chantier hors norme.
Mais avant d'en arriver à de telles conclusions, Manuel Minguez prend soin d'examiner les théories préalablement élaborées, notamment celles de Choisy (utilisation de "chèvres", ascenseur oscillant), Hölscher (échafaudages en sapines), Strubb-Roessler (sapines maintenues par de très longues cordes), Croon (chadouf), Samivel (glissières parallèles), Flinders Petrie (plan incliné), Lauer (rampe perpendiculaire), Adam (rampes à orientation alternée), Goyon (rampes enveloppantes)... "Acharné, non pas à ruiner les hypothèses de [ses] devanciers, mais au contraire à en vérifier le bien-fondé", il se voit contraint à ne pouvoir les admettre, à les réfuter et à leur opposer sa propre solution alternative, tout en s'inspirant de la relation qu'Hérodote fit du chantier de construction des pyramides et dans laquelle il trouve la seule véritable "banque de données" réellement fiable.




La première intuition, dûment confortée par une expérimentation grandeur nature, de Manuel Minguez concerne le moyen de transport des blocs de pierre depuis leur site d'extraction jusqu'au chantier de construction : "La solution s'imposa à moi sous forme d'une proposition apparemment absurde : je ferai flotter des mégalithes !" Par une astucieuse combinaison et complémentarité du principe d'Archimède et de la compensation de flottabilité (rôle joué par une barque, par exemple), les blocs ne sont pas transportés à l'intérieur de la barque, mais "sous" cette embarcation. L'expérience réalisée dans le port de Bonneuil (Val-de-Marne) le 2 octobre 1982 l'a parfaitement démontré : un bloc de béton de 5 tonnes, solidement attaché à une caisse en bois à fond plat, de 3,50 m x 1,50 m x 1,00 m, "flottait".
Et la conclusion devient évidente :"Sans rupture de charge, sans déployer d'efforts surhumains, les anciens Égyptiens avaient pu hisser et déplacer les monolithes les plus lourds avec une précision de manœuvre indiscutable. Cette explication fournit la solution de tous les problèmes apparemment insurmontables que posent aux archéologues les différents types de constructions cyclopéennes."
Mais une fois que les blocs de pierre ont été ainsi transportés par voie fluviale, comment les acheminer jusqu'au chantier de construction, sur le plateau de Guizeh ? Une fois encore, Manuel Minguez se réfère au précieux récit d'Hérodote :"Chéops, suivant ce que me dirent les Égyptiens, régna cinquante ans. Étant mort, son frère Chéphren lui succéda, et se conduisit comme son prédécesseur. Entre autres monuments, il fit aussi bâtir une pyramide : elle n'approche pas de la grandeur de celle de Chéops (je les ai mesurées toutes les deux) ; elle n'a ni édifices souterrains, ni canal qui y conduise les eaux du Nil ; au lieu que l'autre, où l'on dit qu'est le tombeau de Chéops, se trouve dans une île, et qu'elle est environnée des eaux du Nil, qui s'y rendent par un canal construit à ce dessein."
Un "canal construit à ce dessein" : la voilà donc LA solution ! Manuel Minguez s'empresse de commenter :"(...) les Égyptiens de la période de Khéops avaient compris tout le parti qu'ils pouvaient tirer des "chemins qui marchent" et notamment du Nil et (...) ils possédaient en matière d'hydraulique des connaissances amplement suffisantes pour leur permettre non seulement d'exploiter les crues du fleuve, mais, en dehors des périodes de crues, d'acheminer ses eaux jusqu'à l'emplacement de leur choix par le jeu de canaux, de systèmes d'écluses."
Fort de tels constats et de ses convictions, notre technicien de génie civil entreprend, par mode de simulation, mais de façon extrêmement précise et soucieuse du moindre détail, de construire à son tour... sa propre pyramide de Khéops ! Et tout d'abord, comme préalable qui lui prendra quand même, conformément à la simulation et au texte d'Hérodote, la bagatelle de dix années de travaux, il "construit" la voie qu'emprunteront les embarcations lestées de leurs blocs de pierre pour relier les rives du Nil au pied de la pyramide en construction (37 mètres de dénivelée) : un "gigantesque escalier hydraulique" construit en gabions et dallages parfaitement appareillés, composé de 25 sas et bordé d'un chemin de halage, puis d'un "chemin de puisage" pour l'alimentation en eau de la longue cascade d'écluses. Ce chemin de puisage est une série montante de mini-canalisations alimentées en eau par des manœuvres utilisant des seaux de 10 litres.



Pour le stockage intermédiaire des blocs, la mise en place des trois premières assises de l'édifice et l'alimentation des systèmes de levage le long de la pyramide en construction, notre bâtisseur aménage, toujours avec la technique des gabions, deux gigantesques réservoirs d'eau jouxtant le dernier sas. 



À partir de ces réservoirs, le système d'écluses est prolongé progressivement sur les flancs de la pyramide en construction. "À partir de la quatrième assise, une modification de structure intervenait. Les sas étaient construits longitudinalement, c'est-à-dire parallèlement aux réservoirs (...). Cette modification de structure ne changeait cependant rien au principe de fonctionnement déjà décrit à propos du système d'écluses, non plus qu'au mode d'approvisionnement en eau. À partir des réservoirs (...) devenus à leur tour bassins d'expansion et de puisage, et que nous veillions à toujours maintenir suffisamment remplis, les levées d'eau - de moins en moins importantes à mesure que la pyramide s'élevait - étaient assurées par le même moyen que dans l'écluse. À ceci près que l'approvisionnement se faisait sur les faces latérales de la pyramide et non plus frontalement. (...) Les pentes de la pyramide se refermant, les sas se rétrécissant, les besoins en pierres et en eau diminuaient d'autant. Il suffisait alors de continuer sur notre lancée jusqu'au pyramidion qu'une dernière éclusée - la 61e depuis le Nil - nous permit enfin de mettre en place."




 
Fin du chantier. Fin d'une époustouflante aventure, soutenue par des convictions d'ordre technique qui, Manuel Minguez est le premier à le reconnaître, n'ont pas l'heur de plaire à tous, notamment dans les hautes sphères de la recherche archéologique académique !
Il ne me revient pas, conformément à l'esprit du blog, de privilégier cette théorie plutôt qu'une autre. En ai-je d'ailleurs les moyens et la compétence ?
Pour conclure, qu'il me soit néanmoins permis de souligner deux constats.
Le premier, et il est à mes yeux d'une importance majeure : la tonalité de l'ouvrage de Manuel Minquez est authentiquement "culturelle" et nullement polémique, contrairement à une certaine littérature qui aurait tendance à confondre divergence de points de vue et adversité.
Second constat : l'auteur de l'ouvrage (et de la théorie qu'il illustre) adopte par moments un style romanesque à suspense qui n'est pas pour déplaire, loin de là ! Il nous associe ainsi au projet de construction de SA propre pyramide, puis aux différentes étapes de ce fabuleux chantier. Comment ne pas rêver de construire une pyramide aussi prestigieuse que celle de Khéops ? Par la magie de l'écriture, tout devient possible et, croyez-moi, on se laisse prendre à ce jeu... de construction ! Il est d'ailleurs révélateur que l'auteur, consciemment ou non, glisse progressivement, dans l'emploi des verbes utilisés pour son récit, du présent à l'imparfait. Le chantier commence au présent (comme dans un rêve... ou comme dans la réalité). Puis le récit adopte le ton d'un retour sur le passé, comme si le chantier tel que l'a "imaginé" Manuel Minguez s'était bel et bien déroulé conformément à ses intuitions, à ses convictions.
Alors, rêve ou réalité ? Khéops a-t-elle réellement livré le secret de sa construction ?

 
Le système d'approvisionnement en eau des temples 
de la Vallée des Rois, tel que le conçoit Manuel Minguez. 
Ce système présente une certaine 
analogie avec celui qui a permis, selon Manuel Minguez, 
de construire les pyramides.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

une petite précision concernant le premier dessin:
il me semble qu'il est inversé, Kephren au premier
plan doit, je pense,se trouver à droite du dessin et Mykérinos, au fond, à gauche; Cordialement; L.PZ

Jolemer a dit…

En tous les cas, j'étais présent à la démonstration de oct 82 à Bonneuil et le bloc de béton a flotté. Je regrette de n'avoir pas pu assister aux visites commentées sur place, au pied des pyramides ;p
Y.M.

Marc Chartier a dit…

Merci Jolemer pour votre commentaire. Je l'ai porté à la connaissance de Manuel Minguez qui souhaiterait prendre contact avec vous. A cette fin, pouvez-vous SVP me communiquer votre adresse de courriel et, éventuellement, un numéro de tél., non pas sur cette plage de commentaires, mais via mon adresse e-mail que vous trouverez en cliquant sur "Accueil", en haut à droite de cet écran.
Merci par avance.
Marc