mercredi 22 août 2018

"Montagnes de rochers, avec art élevées, Votre masse en impose au voyageur surpris" (H. Viviand-Bellerive, à propos des pyramides de Guizeh)

peinture d'Augustus Osborne Lamplough (1877-1930)

Aucune information n'est à notre disposition sur l'auteur de cette ode - H. Viviand-Bellerive -, sinon qu'il était un "littérateur et tragi-comédien français" de Lyon et que, "non sorti de l'obscurité", il dut mourir jeune.
Les strophes qui suivent sont extraites de l'ouvrage Les Pyramides d'Égypte, ode au Premier Consul, 1801.
Certes, les élans poétiques qui inspirent ce texte ne feront pas progresser nos connaissances en pyramidologie. Ils sont toutefois un reflet de l'émotion que peut susciter la vue de ces monuments dont "le temps rongeur a vainement miné (le) durable ciment".

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De l'industrie humaine, antiques témoignages,
Vous, qui perpétuez la grandeur de ces rois, 
Qui, depuis trois mille ans, de votre énorme poids, 
Du fleuve de l'Égypte ont chargé les rivages, 
Salut, monuments merveilleux, 
Dont le sommet se perd aux cieux.

Montagnes de rochers, avec art élevées, 
Votre masse en impose au voyageur surpris ; 
Il croit être témoin de ces travaux hardis, 
Que firent des Titans les troupes soulevées, 
Lorsque dans leurs vœux criminels 
Ils en voulaient aux immortels.

Un sublime génie, et plus qu'humain, sans doute, 
Aida de ses conseils l’architecte fameux 
Qui sut bâtir ainsi, pour nos derniers neveux, 
Ces monuments ; l’effroi de la céleste voûte !
Quelles machines, quelles mains 
Ont accompli ces grands desseins ?

Sur la rive du Nil, leurs bases étendues, 
Des plus vastes cités tiennent l'emplacement, 
Et, fièrement monté jusques au firmament, 
Leur front pyramidal est tronqué par les nues ; 
Le temps rongeur a vainement 
Miné leur durable ciment.

Que de fois notre globe a roulé dans l'espace 
Depuis que ces tombeaux 
Étonnent l'univers ! 
Les astres ont subi des changements divers, 
Eux seuls ont conservé leur structure et leur place.
Et , depuis trente âges debout, 
Ils attendent la fin de tout.

Assise sur le roc, leur masse inébranlable 
Comprime de son poids la fureur des volcans ; 
Elle est le non plus outre où les fiers ouragans 
Viennent amonceler ces montagnes de sable, 
Que la terreur de ces climats, 
Typhon, roule devant ses pas.

Phébus, avant d'ouvrir sa brûlante carrière, 
Ainsi qu'après avoir dérobé ses rayons, 
Restes de la grandeur des puissants Pharaons, 
Sur vos sommets aigus fait briller sa lumière, 
Quand sa sœur, dans son triste cours, 
Du Caire encor blanchit les tours.

La curiosité qu'enflamme votre vue, 
D’une main incertaine et d’un pied chancelant, 
Sur vos flancs inclinés gravit, rampe en tremblant ; 
Mais, parvenue, enfin, sur votre cime aiguë, 
Elle y jouit, avec transports, 
Du prix de ses hardis efforts.

De là, l'œil effrayé plonge sur l’Arabie, 
Suit du Nil bienfaisant le cours majestueux, 
Contemple l'âpreté de ses bords montueux, 
Et la brûlante mer des sables de Libye, 
Où, sacrilèges conquérants, 
Périrent cent mille Persans.

Promenant sur l'Égypte un regard circulaire, 
Quels pensers, quel contraste occupent nos esprits !
Là, fut Memphis et Thèbe, où l’on voit des débris ; 
Ici, d'Alexandrie et du superbe Caire
Les tours, les minarets sacrés
Font briller leurs croissants dorés.

Ô Prodiges de l'art ! que la Parque fatale, 
Trop favorable aux vœux des cruels conquérants ; 
A tranché de destins dans ces célèbres champs 
Où s’étend de vos corps l'ombre pyramidale, 
Vos flancs ont retenti cent fois 
Des cris des mourants aux abois !

Vous vîtes, tour à tour, les maîtres de la terre 
Déployer devant vous leurs fières légions, 
Et, jaloux d’occuper ces belles régions, 
Y répandre partout les horreurs de la guerre !
Ils sont passés, ces conquérants, 
Et vous restez, fiers monuments !
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